Rêverie

Et si ce soir sur la couche je frissonne,
crois-tu que pour autant, ici j'abandonne ?
L'obstination, ma caractéristique
m'en empêcherait, c'est ma marque de fabrique.

Bien entendu j'ai des envies lubriques,
au delà des dames pas assez ludiques.
Mais ce soir, comme souvent, cognac et verre
guideront ma plume musardière vers

d'autres ailleurs, calmes et lointains paysages.
Mon amie, donne-moi la main, en voyage !
Gréons nos âmes, tendons tendus tels haubans,
larguons les amarres vers cèdres du Liban.

Douceur marine et un parfum de roses
en pétales serrées, quelle belle chose
que cette carnation tendre subtile
que j'effeuille de mes doigts si malhabiles.

Odeurs de musc, de benjoin, myrte et myrrhe,
celles qui si souvent surent mon cœur ravir.
L'encens, volutes lourdes roulant sous voûte
d'orgue tonitruant. Dieu là écoute.

Ou bien alors repartir sur la route
par delà l'Iran, la secte de Malamut.
Loin, plus loin, l'Inde rêve de maharadja,
tigres, éléphants là-bas vers le Gujarat.

Franchir le Mékong de nuit sur calme sampan
entouré par en étourneaux des sacripants,
vers d'autres nuits câlines, oui nuits de Chine,
volutes d'opium, esprit qu'on lamine.

Cliquetis saccadé rapide de tuiles,
son sec en staccato filant comme huile.
Dominos locaux étranges que le mah-jong,
j'ai tout perdu, embarquons sur cette jonque.

Allons donc vers cette île du soleil levant,
du Levant à l'Asie en semelles de vent.
Gastronomie locale, makis et sushis,
version marine de la tauromachie.

Oreilles et queues posées sur rouleaux de riz.
Mais que vois-je ? Sur les ailes de ma rêverie
tu t'allonges, te détends et enfin souris.
Cette récompense est douce griserie.

Ces yeux bruns profonds comme noix de Coco,
oui par delà la bourre en usages locaux,
accéder au cœur, cette chair pulpe blanche,
tumultueux sentiments en avalanche.

La vie va. La vie vient, éternel ressac
qui me met la tête à l'envers, oui à sac.
Sous ma plume l'encre fluide s'écoule
et ainsi lente houle mes vers déroule.

Baudelaire, illustre poète sombre
étend sur moi ton inspiration, ombre
où je me drape, subtiles correspondances
où les échos légers de tes strophes dansent.

Oui, lectrice mon élue, tous deux le savons,
par ces strophes, tendres écrits, destin bravons.
Ce n'est pas de la poésie, mais belle lettre
pour dire, c'est écrit, qu'avec toi je veux être.