Ce soir je chéris le souvenir d'un instant,
moment précieux, minutes volées au temps.
Cet assassin félon et opiniâtre,
ce bellâtre susurrant, le teint olivâtre,
ses blessantes insinuations vives
qui la tristesse, la souffrance avivent,
manipulations qui toutes là portent.
Oui, le temps est bien un sale cloporte !
Mais foin de cette amère digression,
je préfère là autre contemplation.
Oui ce soir je flotte, aimable carotte
m'a réjoui. J'ai des envies de gavotte
sobre, une danse joyeuse, non bourrée.
Je rêve de mambo, voire de tamouré.
Oui, soyons gais, soyons gais avec excès ;
rions à gorge déployée, fracassée.
Sous d'autres cieux et autres latitudes,
oui d'autres dieux, autres attitudes,
passer les tropiques, nourrir les moustiques.
Se gratter au sang ici où cela pique.
Tester sa vie intérieure face
aux vagues, long flot du Pacifique, lasse
houle arrivée lente des Amériques,
regard perdu, méditation unique.
Ecoutez le chant du Monde, chant de l'onde.
Regardez rouler les noix de coco rondes,
marche ridicule des crabes de terre,
pinces claquant dans la mangrove, bruit vert.
La fumée légère au dessus de ce four
canaque où cuit un bougna, le plat du jour
avec ignames, patates douces, taros
et la pêche du lagon sortie de l'eau.
Voir passer les tortues marines sereines
escortées par les lamantins, les baleines.
Tranquille migration en transhumance,
rythme paisible, agréable cadence.
Le clapot régulier contre l'étrave
berce mon esprit, oui le repos des braves
c'est de céder à la houle hypnotique
en contemplant une si belle plastique,
la femme-orchidée, femme-liane
aux yeux bleus couleur de fleur, de gentiane,
gracile, subtile odeur vanille
devant laquelle mon cœur affolé vacille.
Le chant de l'alizé qui bruit dans les palmes
vante inlassable l'ensemble des charmes
de l'ambre beauté devant qui je me pâme
et que j'incante sans cesse, vous ma Dame