Garde en toi, bien-aimé, l'oeuvre de poésie,
Garde en toi cette force et ce chant intérieur,
Désert qui t'a élu pour une tâche pure,
Puisse-t-il être ne toi en enracinement.
La poésie mûrit et vit dans le silence,
Le silence a semé la somme du futur,
Les grands rythmes, les feux et les clameurs du sang,
Les révélations, les jubilations.
Nos rêves anciens et nos rires d'enfants.
La poésie mûrit, vit dans la patience,
Mère au coeur innombrable, elle sourit sans cesse,
Reine de la nuit bleue, elle active les sèves,
Témoins des cris d'amour, des germinations.
Redis, ô poésie, un message d'enfant,
Sois fidèle toujours à cet âge béni,
Scrute l'appel discret des années abolies
Comme le chant des eaux sous une voûte immense
Témoingne au monde las d'une autre filiation.
Retrouve chaque jour de l'enfance endormie
L'insouciance reine, le vrai détachement,
Le diadème des yeux agrandis de bonheur;
Souviens-toi que le monde a perdu son sourire,
Ami, redresse-toi, regarde ton enfance,
Va, remonte vers elle comme vers un sommet.
Remonte vers tes fils, réapprends avec eux
A t'étonner de vivre dans l'ardeu de midi
Quand la pinède crie et que la vigne tremble
Car les yeux de nos fils sont poèmes d'azur
Et nos filles jolies revêtent l'éternel.
La poésie mûrit et vie avec laterre
Qui nous donne les fruits d'une vraie passion
Soeur de la poésie, nourrissante come elle.
Elle geint, elle crie, elle appele, elle pleure
Respecte son sommeil, ivre de tant de peine,
Le nuage caresse la cime ravinée,
La glèbe s'ouvre, s'offre au pafum de la nuit
Et à l'outil des hommes, inlassables semeurs
.
Capte pour le discours l'invisible harmonie
Qui, lon des profondeurs, s'envole vers les dieux.
La poésie jallit, maintenance d'amour,
Elan, mime, refrain, et danse millénaire,
Va, construis le poème de la nouvelle joie.
Refuse-toi sans cesse à la folie des hommes:
Le père doit souffrir pour que vive l'enfant.
Lève-toi, mon ami, l'aurore te convie,
La marche est harmonie et son balancement
Rejoint le flux des eaux, du sang et de la vie.
La poésie se tait puis, un jour, etincelle,
Fuse, surgit, éclate en un cri de triomphe.
L'entendrons nous? Qu'importe! Il te faut travailler.
La contrainte est méthode, la règle le salut.
Le premier vers est don, le deuxième est travail.
Construit avec les mains et la douleur des hommes,
Oeuvres de tant d'espoir, de tant de patience,
De tant de coeur dolents et de joies enfouies
Depuis le premier jour où frissona le monde.
Le crois-tu, mon Ami? Es-tu prêt pour cette oeuvre?
O Poète, titan, cariatide de Dieu!