Ce soir, la nuit étend son sombre noir manteau
et là dans les ruelles sortent les catins
en troupeau attendant chaland en paletot.
Il y eut un soir, et il y eut un matin.
Plus loin, à la campagne on trouve des poules.
Un autre style, rustique et moins mutin
pour peuplement clairsemé et moins de foule.
Il y eut une nuit, il y eut matin.
La nuit, au loin, brille étoiles et astres
et aussi la lune en lueur flattant le teint
et moi, je rumine face au désastre.
Il y eut un soir, et il y eut un matin.
Tant de temps, et si peu de chemin parcouru.
Si au moins j’avais alors été diablotin !
Mais non, de moi on dira « d’ennui il mourut ».
Il y eut une nuit, il y eut un matin.
Alors je rêve de Bretagne, en Ankou
et ajoncs, danses de korrigans et lutins.
Je sais cela me prend comme cela d’un coup.
Il y eut un soir, et il y eut un matin.
Déjà j’entends en échos mugir la houle
et je rêve de bateaux, pêche, menu fretin
alors que ma tête lourde enfin roule.
Il y eut une nuit, il y eut un matin.
Parfois, je me regarde agir ou ne pas.
Impulsions saccadées, rouge petit pantin
que la ficelle emmène là pas à pas.
Il y eut un soir et il y eut un matin.
Alors parfois devant ton incrédulité
qui me taxe, je m’insurge tel maillotin,
Parisien moyenâgeux ici révolté.
Il y eut une nuit, il y eut un matin.
L’humeur sombre comme ce ciel qui là s’encre,
je peste, je jure, sacre tel philistin,
et là, la bile me ronge comme chancre.
Il y eut un soir et il y eut un matin.
Puis, en sa rumeur pastel, la blanche aube
apporte gazouillante nocturnes potins
alors qu’elle marche légère en robe.
Il y eut une nuit, il y eut un matin.
Mon œil s’attarde et mon esprit dérive,
l’imaginant frêle et nue sous le satin.
J’aimerais avec elle changer de rive.
Il y eut un soir et il y eut un matin.
Partir sous des cieux bleus, tièdes et pacifiques.
Elle assise dans un grand fauteuil en rotin,
moi perdu en cette vision érotique.
Il y eut une nuit, il y eut un matin.
Si la vie est faite d’aurores si roses,
sache qu’il leur faut fumier, crottin,
comme avant la joie tu seras morose.
Il y eut un soir et il y eut un matin.
La rumeur s’est tue, même pas une clameur
et mon siège se révèle strapontin.
Triste époque qui m’ennuie en ses mœurs.
Il y eut un soir. Y-aura-t-il un matin ?