Trotte, trotte, menue petite aiguille
mesure implacable du temps qui passe.
Tu te débats, tressautes. Pauvre anguille,
contre les parois du sablier te fracasse.
La jeunesse s'en va, la jeunesse s'écoule,
petit flot, mince rivière de sable.
Sous tes yeux ta mémoire part et se déroule
emportée par les secondes implacables.
Vieillir, mourir, étrange assassinat,
je ne vois que futures victimes lasses.
Le coupable est connu, en sang incarnat.
La vie qui réjouit avant qu'on ne trépasse.
Et je pense aux médecins, morticoles,
qui guérissent tout, sauf ce qu'on ne peut pas,
chers à Léon, en ses invectives drôles
et leurs patients passant de vie à trépas.
Vraie souris, de ses petites dents aiguës,
la trotteuse avec ses dents blanches quenottes
sans hésitation, secondes ambiguës,
notre vigueur et existence grignote.