Cette pluie, archet malveillant
sur mes os glacés, son grinçant
en mouvement funèbre, lent,
qui étire mon front grimaçant.
Mes articulations là couinent,
triste chanson de l'arthrose
en ses rimes mesquines.
C'est là chanson bien morose.
Cette ondée en ses gouttes
dégouline de ces branches
comme mon sang en déroute
rouge sur la page blanche.
Mais noblesse là oblige !
Aussi est-ce en vif sang bleu
que ma vie ici se fige
dans ce recueil qui vous trouble.
Un bleu céruléen comme
lointains paradis tropicaux
en leurs azurs, rêves d'hommes
blancs enfermés en bocaux.
Oui rangés tels des cornichons
en leurs uniformes tenues,
debout comme en rang d'oignons,
tout en tact et en retenue.
Et ils avancent, reculant
à petits pas, petits pas d'oie
saccadés et les bras ballant
comme petits soldats de bois.
Les tambours mornes de la pluie
sont métronomes et cadence
de ce jour où la joie s'enfuit
quand la tête lourde lance
et là s'incline lentement
cédant à l'appel du plateau
qui attend ici sagement
mon crâne de vieux zigoto.
Miracle, voici le soleil
en zigzag sur cette table
qui m'arrache au lourd sommeil
en tentation regrettable.