Les sources se lassaient
Les sources se lassaient de tourner dans leur cage
Quand l’eau des robinets provoquait des naufrages
Entraînant la maison et tous ses habitants
Dans un tourbillon comme un rêve palpitant
Ou comme un feuilleton de télé quand la nonne
Tend sa poitrine nue au moine qui ânonne
Des exorcismes dont la plupart de travers
Pendant que sur les toits le ciel bleu devient vert
Et le roucoulement des pigeons plus personne
Ne l’entend ni les voix qui sous les ponts résonnent
Dans la ville à la nuit rôdait le caïman
Qu’une fille superbe et rousse son aimant
Avant que ne pointât l’aube attirait vers elle
En lui montrant ses bas noirs jusqu’aux jarretelles
Des tigres promenaient leur ennui dans les rues
D’autres dans les déserts ayant longtemps couru
Savouraient la fraîcheur de tombeau des églises
Dont la pierre a parfois des yeux de souris grise
L’escalier du clocher formant une spirale
L’église se changeait pour eux en cathédrale
Quand ils en gravissaient les marches jusqu’au ciel
De là ils se laissaient glisser sur l’arc-en-ciel
Ou prenaient un taxi c’est-à-dire un nuage
Puis le vent se levait tournant ainsi la page
Du livre qu’écrivaient dans l’air du bout des branches
Les arbres inspirés par tout ce qu’il déclenche
Peu à peu la maison s’humanisait ses dents
Ne cherchaient plus à mordre et si par accident
Une tuile tombait du toit c’était la foudre
La cheminée laissait en paix la femme coudre
Et l’homme lire un livre à l’envers si distrait
Que ses aïeux riaient de lui sur leur portrait
Pour ne pas s’endormir les poutres du grenier
Priaient pour que la mouche échappe à l’araignée
Tandis qu’un mannequin tout couvert de poussière
Arpentant le couloir la démarche princière
Assurait qu’il avait dans une autre existence
Après d’affreux délits fini sur la potence